C’est inédit dans la tradition Bamiléké. Modifier le rite de veuvage, c’est le meilleur cadeau que pouvait offrir le chef Bahouoc aux femmes de sa communauté. En effet, se déchirer ses vêtements et s’enrouler au sol pour manifester sa douleur, dès l’annonce du décès de l’époux, ne pas se laver et rester avec le même vêtement pendant plusieurs jours, se coucher pendant des jours sur les feuilles de bananiers, manger avec une cuillère en bois qui ne se lave pas pendant des jours ou encore coucher avec un membre de la famille du défunt époux, sont quelques actes auxquels, la femme Bahouoc ne sera plus soumise. Contenu dans un nouveau code, sa majesté Roger Kemadjou, chef de ce village du département du Ndé dans la région de l’ouest, vient de le confirmer à Douala ce dimanche.
Au cours d’une cérémonie riche en animations culturelles, une démonstration de ce rite qui, pensent certains, dégradait la femme a été faite. C’est donc une révolution dans une culture Bamiléké et précisément Bahouoc où les traditions sont sacrées et se respectent à la règle. Ces pratiques qui par le passé étaient obligatoires et incontournables, viennent de connaitre des amendements. Dans son article 9, l’étape de s’enrouler par terre et de se déchirer les vêtements devient facultative. Cependant, la veuve peut de manière symbolique déchirer un bout de son vêtement. Et pour se nourrir, elle le fera désormais à sa convenance, toutefois dans les conditions d’hygiène et de salubrité favorables, et il en sera de même pour son hygiène corporelle.
Quelques modifications interviennent également à l’article 11. La femme dans la douleur de la perte de son conjoint, pourra opter pour un matelas ou une natte sur lequel elle peut dormir. Son témoignage au cours de l’enterrement se fera en toute liberté et toutes les brimades, injures et accusations injustifiées qui accompagnaient cet acte auparavant sont désormais interdites. Pour les femmes de ce village, c’est une révolution pour le respect de la dignité de la femme. D’ailleurs, cette modification nous dit-on, a été adoptée à la demande d’un groupe de femmes influentes de cette communauté. « On s’était rendu compte que les droits de la femme à travers ces rites étaient bafoués, on ne respectait pas la dignité de la femme. Un groupe de femmes s’est mobilisé et elles sont allées auprès du chef et avec le soutien des organismes internationaux, ils ont opté pour un code coutumier et c’est celui-ci qui sera mis en pratique désormais », précise une reine mère Bahouoc.
Néanmoins quelques règles restent inchangées. A savoir, le rite de la consommation du plantain brûlé par la veuve et son fils ainé, et également le geste qui consiste à nettoyer la concession après les jours de neuvaine par un cousin, pour nous dit-on éloigner le deuil et la malédiction de la famille.
Bonne soirée à tous.
Texte et images: Ines Nzuimânto